LA SAINT NICOLAS : FÊTE DE QUOI ?
- Posté par Guillaume Lemonde
- Catégories Articles, Démarche Saluto, Exercices pratiques
- Date 6 décembre 2022
LA SAINT NICOLAS : FÊTE DE QUOI ?
C’est aujourd’hui la Saint Nicolas, fête populaire dans de nombreux pays d’Europe. Saint Nicolas récompense le bon comportement des enfants en les gratifiant de cadeaux ou de friandises.
Son compagnon de voyage, le père Fouettard ou Ruppelz en Lorraine, Hans Trapp en Alsace, Knecht Ruprecht en Allemagne ou Schmutzli en Suisse alémanique, grimé de noir, est chargé de punir ceux qui n’ont pas été sages.
Selon certaines versions de la légende, le père Fouettard est le boucher qui a égorgé, coupé en petits morceaux et mis au saloir trois enfants qui avaient trouvé refuge chez lui. Mais saint Nicolas put ressusciter ces enfants.
Vous trouverez un intéressant exposé (dont la conclusion n’engage toutefois que son auteur) dans la bibliothèque en ligne Watchtower. J’en reproduis un extrait ci-dessous :
On peut lire dans l’encyclopédie néerlandaise Encyclopedia Oosthoeks :
“La fête de famille [de la Saint-Nicolas] provient de la fête religieuse (y compris les surprises pour les enfants) qui, elle, a sa source dans des éléments préchrétiens. Saint Nicolas, qui chevauche au-dessus des toits, est le dieu païen Wotan [Odin]. (…) Saint Nicolas était aussi le chef de la chasse sauvage au cours de laquelle les âmes des morts rendent visite à la terre.”
En effet, pour les Teutons Odin (ou Wotan), le plus important de leurs dieux, conduisait les âmes des morts en une furieuse chevauchée à travers champs pendant les “douze mauvais jours” qui séparent Noël et l’Épiphanie (6 janvier).
Le grand vent qu’il soulevait emportait les semences du produit des champs, ce qui stimulait la fertilisation. Quant aux pommes, aux noix, aux noisettes, aux amandes et aux autres fruits d’automne distribués à la “Saint-Nicolas”, ils étaient des symboles de fertilité. Les anciens croyaient pouvoir apaiser la colère de leurs dieux en leur faisant des cadeaux pendant les jours froids et sombres de l’hiver. Ils en obtiendraient une plus grande fertilité pour l’homme, l’animal et le sol.
Odin était accompagné par son valet Eckhard, le prédécesseur de Pierre le Noir, qui, lui aussi, portait une verge. Pas plus tard qu’au Moyen Âge, il était courant d’admettre que certains arbres et plantes pouvaient rendre les humains féconds et qu’une femme pouvait tomber enceinte simplement si elle était frappée avec une branche d’un de ces arbres.
Le livre Feest-en Vierdagen in kerk en volksgebruik (Fêtes et cérémonies dans l’Église et dans les coutumes populaires) cite quelques autres similitudes entre Odin et saint Nicolas: “Wotan, lui aussi, remplissait bottes et sabots placés près de la cheminée, mais avec de l’or. Pour le coursier de Wotan, on plaçait également dans le sabot du foin et de la paille. En outre, la dernière gerbe des champs était réservée au cheval.”
Saint Nicolaas, de B. van den Aardweg, signale encore d’autres similitudes frappantes:
“Saint Nicolas: personnage grand et puissant monté sur un cheval blanc. Il porte une longue barbe blanche, tient une crosse à la main et il est coiffé d’une mitre (…) et revêtu d’une cape d’évêque, large et flottante.
“Wotan: personnage de haute stature et à la barbe blanche. Il porte un chapeau à larges bords enfoncé sur les yeux. Il tient à la main une lance magique. Il est enveloppé d’une grande cape et monte son fidèle cheval gris, Sleipnir.
“Il y a plus que ces similitudes visibles: Wotan menait son cheval gris à travers les airs, et les gens, tout tremblants, lui offraient des gâteaux fourrés, de la viande et des produits des champs. Saint Nicolas, à cheval, passe au-dessus des toits, et les enfants préparent du foin, des carottes et de l’eau pour sa monture. Les gâteaux secs au gingembre et la baguette étaient des symboles de fertilité longtemps avant l’apparition des fêtes de saint Nicolas.”
Ainsi, la Saint Nicolas viendrait christianiser un fête nordique ancienne ou il est question de la mort et de la fertilité.
Au dernier jour les âmes chevauchent avec Wotan, tandis que le premier jour s’annonce dans la fertilisation des champs qu’il permet par le grand tumulte provoqué par sa cavalcade. Wotan se trouve à la fois dans le premier et le dernier jour.
Il est possible que cette fête rapprochant la mort et la fertilité faisait faire l’expérience d’un intervalle comparable à ce que « l’exercice du premier jour et du dernier jour » propose.
(exercice expliqué dans la vidéo au sujet de la confiance. Vous la trouverez en suivant ce lien).
En quelques mots, cet exercice est le suivant.
– On prend tout d’abord le temps de rester avec la proposition « Ceci est mon premier jour » et de bien ressentir l’impression que cela fait ;
– puis on prend le temps de rester avec la proposition « Ceci est mon dernier jour » et de bien ressentir l’impression que cela fait ;
– enfin, on prend le temps de rester avec le souvenir de ces deux expériences, sans les mettre en balance, sans les comparer, sans en préférer aucune des deux ;
Ce faisant, une expérience peut se faire : celle que la vie est bien comme elle est. Elle est bonne en soi, que cela nous plaise ou non ou que notre avis sur le sujet soit autre.
Cette expérience est portée par l’attention que l’on offre au dernier et au premier jour de chaque événement, à la fin et au début de toute chose. Cette attention particulière, c’est ce que l’on peut appeler la confiance. La confiance se vit au présent. Elle est active à n’attendre rien de particulier, ouverte à ce qui se présente.
Lorsque l’on ne peut pas s’ouvrir à ce qui se présente, nous passons à côté des cadeaux que la vie nous fait.
Et l’or de Wotan n’est pas reçu…
Nous avons alors besoin de mettre nous-même dans la vie de quoi espérer qu’elle puisse être bonne. Il faut faire quelque chose pour qu’elle soit bonne un jour.
C’est ainsi que la confiance est remplacée par l’espoir.
L’espoir ne se vit pas au présent mais dans l’attente passive (passive parce qu’une fois que l’on a fait ce qu’il fallait, on ne peut plus changer grand chose à ce qui arrivera finalement) de quelque chose de rassurant. Par exemple, on se comporte bien pour être digne d’aller au Paradis.
C’est ainsi que saint Nicolas intercède pour nous auprès de Dieu (voir la prière à Saint Nicolas). Il félicite les enfants sages, car ils sont sur le chemin qui laisse espérer une récompense telle que le Paradis.
Pourtant, la Saint Nicolas, fête bien sympathique des enfants sages, pourrait être l’occasion, comme l’ancienne fête de Wotan qu’elle a remplacé, de découvrir une façon nouvelle d’être ouvert à la vie.
Cela ne dépend pas de la fête elle-même, qui est très bien comme elle est !
Cela dépend juste de la manière que nous avons de la rencontrer; et en particulier de la manière que nous avons de rencontrer le Père Fouettard… Pourquoi donc ? Nous le verrons dans le prochain article.
Guillaume Lemonde
Médecin, chercheur, développe et enseigne la démarche Saluto dans ses différents champs d'application. Après des études de médecine à Lyon, il découvre la pédagogie curative et la sociothérapie, alliant la pédagogie et la santé. Pour lui, la question de toujours est d’offrir l’espace et les moyens permettant à chacun de devenir acteur de sa vie. Il ouvre un cabinet en Allemagne où il poursuit ses recherches dans le cadre de l’éducation spécialisée, puis en Suisse.
À partir de l’étude des grands chapitres de la pathologie humaine, il met en évidence quatre étapes de la présence à soi et au monde (1995) et découvre et développe à partir de cette recherche la Salutogénéalogie (2007) et la démarche Saluto (2014).
Il donne des conférences et des séminaires de formation pour enseigner cette démarche.
Il est auteur de publications faisant état de ses travaux.
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