LES RENCONTRES HUMAINES – l’avenir s’annonce
- Posté par Guillaume Lemonde
- Catégories Présence et attention, Temporalité, Travail biographique (Saluto Biographie)
- Date 16 octobre 2020
LES RENCONTRES HUMAINES – l’avenir s’annonce
En souvenir d’Athys Floride
UN JOUR QUELQU’UN APPARAÎT DEVANT VOUS, QUELQU’UN QUI SERA IMPORTANT DANS VOTRE VIE
Un jour quelqu’un apparait devant vous, quelqu’un qui sera important dans votre vie, mais vous ne le savez pas encore. Vous allez percevoir cette personne, peut-être même lui parler. Cependant, pour toutes sortes de raisons, il est possible que vous vous perdiez de vue pendant un temps. La rencontre n’ira pas plus loin pour le moment. Pourtant, peut-on dire que la rencontre ne se soit pas faite ?
Cela dépendra de la suite, me direz-vous. En effet, cette personne pourrait bien réapparaitre. La vie pourrait permettre un nouvel échange ouvrant soudain, cette fois-ci, un champ d’expériences inattendues. Et alors on se souviendra de cette première fois, de ce premier instant. On comprendra que la rencontre s’annonçait déjà à cette époque. On se souviendra s’être déjà croisé ici ou là et avoir échangé quelques mots ou vécu ensemble un même événement. La rencontre à venir s’annonçait à notre insu. On la reconnaitra après coup.
La reconnaissance « après coup » des moments importants qui ont précédé la rencontre déterminante, nous renseignent sur la nature même des rencontres. Les rencontres viennent de l’avenir… Il faut se trouver plus loin dans le temps pour mesurer l’importance de la première fois. La première fois n’est d’ailleurs une première fois que parce qu’il y eu d’autres fois après…
LES RENCONTRES SE PRÉPARENT DEPUIS L’AVENIR
Les rencontres se préparent depuis l’avenir. C’est pour ça qu’elles nous prennent par surprise. Par hasard, dira-t-on, nous nous sommes retrouvés au même endroit, au même moment.
Elles ne se laissent pas prévoir. Autrement dit, elles ne suivent pas une logique selon laquelle chaque événement serait le développement de causes passées. S’intéresser aux raisons qui dans le passé ont permis une rencontre, c’est passer à côté de la rencontre : ce qui vient du passé est soumis à une antériorité et ne peut être que le développement de ce qui existe déjà.
Ce qui vient du passé ne peut jamais apporter quelque chose de fondamentalement nouveau.
« Et puis il y ceux que l’on croise, que l’on connait à peine, qui vous disent un mot, une phrase, vous accordent une minute, une demi-heure et changent le cours de votre vie. » [1]
Le cours de la vie est changé car les rencontres ne viennent pas du passé. Elles viennent de l’avenir. C’est pourquoi elles sont susceptibles de rendre possible quelque chose de totalement nouveau et donc d’unique. Chaque rencontre est un trésor qui s’annonce. Chaque rencontre est sacrée.
Mais voilà, l’avenir par nature nouveau, bouscule le passé par nature toujours pareil…
Quand quelque chose de l’avenir veut se manifester, le passé est remis en question. Et cela peut faire peur. Il va falloir renoncer à quelque chose. Un point de vue ? Une situation de vie ? Cela est pour le moins inconfortable. Cela demande de la présence pour ne pas se laisser prendre par cette peur qui à tout prix ne voudrait pas nous voir remettre quoi que ce soit en question.
Sommes-nous prêts à offrir cette présence ? La plupart des rencontres s’achève avant ce choix. Elles s’installent dans un cours chronologique au grès des sentiments qui fluctuent. Elles perdent leur rapport à l’avenir. C’est affaire d’alchimie : il faut être deux pour se rencontrer et bien des trésors se perdent.
ACCUEILLIR L’AVENIR, ACCUEILLIR LA RENCONTRE NE VA DONC PAS SANS UN RENONCEMENT.
Intérieurement, nous allons être appelés à renoncer à ce que nous croyons, ce que nous pensons… Si nous voulons nous ouvrir à la rencontre et offrir à l’avenir un espace de concrétisation, nous allons avoir à faire silence intérieurement. Ne pas nous projeter dans un résultat par exemple. Vouloir la rencontre et son développement sans se projeter dans un résultat. Autrement dit, rendre l’avenir possible tout en s’en tenant au pas qui est à faire maintenant. Il n’y a pas de stratégie, pas de plan. Juste un chemin sur lequel on avance sans savoir quand il aboutira. D’ailleurs, quand on ne se projette pas, le chemin est complet dans le pas qui se fait actuellement. La rencontre ne peut se vivre qu’au présent.
Afin de ne pas nous projeter, nous allons apprendre à ne pas suivre les pensées qui pensent toutes seules en nous. Les sentiments qui résonnent avec elles, nous allons apprendre à découvrir un endroit à partir duquel nous pouvons être stables en leur cœur.
Les difficultés que nous éprouvons (ou éprouverons) au contact de l’autre ne sont que les ombres portées de cette présence qui se cherche.
EN EFFET, CETTE RENCONTRE QUI S’ANNONCE EST COMME UNE LUMIÈRE QUI PROJETTE DEPUIS L’AVENIR UNE OMBRE DANS LE DÉCOR DE LA VIE.
Cette ombre peut être chatoyante et susciter une forte sympathie. Elle peut être obscure et faire peur. En tout cas, elle change avec le temps, alors que la lumière s’approche. Allons-nous rester aveuglés par l’obscurité ou à la chatoyance de ces ombres ?
Les épreuves intérieures (comme celles que Goethe et Schiller ont connues à six reprises avant que leur amitié ne se scelle), sont de telles ombres portées. Elles ne signifient pas que la rencontre ne doit pas avoir lieu… Ce serait déterminer l’avenir à partir du passé… Elles signifient au contraire qu’une lumière est à accueillir et qu’une présence est requise chez chacun des partenaires pour traverser l’ombre. Une stabilité au cœur des sentiments qui se brusquent, du courage, de la confiance, etc. Cela se fera-t-il ? C’est affaire de chacun et absolument libre.
L’avenir, on ne peut pas le prévoir. On peut juste le permettre.
Parfois, c’est extérieurement que l’ombre se manifeste. Par exemple, le développement de la rencontre est rendu difficile par un nombre vertigineux de kilomètres. C’est la même ombre, projetée à l’extérieur. De la même façon, elle nous demande de déployer de la confiance, du courage, de la tempérance, de la stabilité intérieure.
En tout cas, l’intensité de ces épreuves est à la mesure du trésor qui s’approche.
Si les deux le veulent.
Si les deux s’offrent à lui.
ALORS UN ESPACE SE FORME ENTRE LES DEUX PARTENAIRES
Et dans l’espace de la rencontre que chacun offre à l’autre, plus grand qu’eux deux se dépose.
La rencontre est un être, un troisième, présent entre les deux partenaires.
Athys Floride évoquait à ce sujet, une transsubstantiation.
De fait, ce qui vient du passé, les expériences traversées, le contexte de vie, se font réceptacle pour ce que la rencontre a de sacré. Et comme ce sacré de la rencontre est ce qui a mis en place le décor et ses épreuves, ceux-ci changent de nature et se clarifient. Les ombres se dissipent et les kilomètres fondent.
Ainsi, la rencontre est un présent. Elle se vit au présent. Elle s’offre comme une grâce, en réponse à l’attention que l’on offre à son partenaire. Une attention qui par essence suppose l’amour, puisqu’elle se donne sans attente.
Guillaume Lemonde
[1] Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi – Katherine Pancol
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4 Commentaires
Merci, Guillaume d’avoir traité ce sujet si éminemment important, à l’heure où la superficialité atteint aussi la rencontre.
Peux-tu me dire où se trouve cette citation chez RS: « Toute religiosité qui à l’avenir se développera au sein de l’humanité, impliquera que l’image de Dieu soit reconnue en chaque homme, dans la réalité immédiate et pratique de la vie ( pas seulement en théorie). Alors, la rencontre de tout être humain avec un autre être humain sera, de prime abord, un acte religieux, un sacrement ».
Je l’ignore, cher Michel. Mais si tu la retrouves, je suis preneur! Merci.
Moi aussi… sinon je finirais par penser à un plagiat…