LA MORT N’EST PAS PLUS PROCHE DU VIEILLARD QUE DU NOUVEAU-NÉ
- Posté par Guillaume Lemonde
- Catégories Articles, Démarche Saluto, Temporalité
- Date 27 octobre 2023
LA MORT N’EST PAS PLUS PROCHE DU VIEILLARD QUE DU NOUVEAU-NÉ
Khalil Gibran Le sable et l’écume, Albin-Michel, trad. Jean-Pierre Dahdah
D’un point de vue statistique, la mort est plus proche du vieillard que du nouveau-né, évidemment. L’un se tient à vers la fin du parcours et l’autre au début. Mais ce n’est que d’un point de vue statistique, c’est-à-dire du point de vue qui projette sur l’après-maintenant ce qui est prévisible (Littéralement : « Ce qui a été déjà vu » ). Lorsque l’on traverse la vie en se référant à ce qui est prévisible, on reste avec ce que l’on connaît. On ne bouge pas. Il y a dans ce qui est prévisible, l’inertie du passé qui détermine la suite des choses selon un enchaînement de causes et d’effets où aucun espace de liberté ne fait jour. Ce qui est prévisible n’est jamais que la continuation de ce qui est déjà là. Ainsi, le vieillard est en continuité du nouveau-né. Il n’a pas changé de nature. Il est la même chose plus loin dans le temps.
Ce qui change, ce qui est nouveau à chaque instant, ce qui n’est pas prévisible et qui ne se déduit pas de ce que l’on connaît déjà, ne peut donc pas provenir du passé. Cela fait irruption à chaque instant depuis ailleurs que du passé. Cela ne suit pas la flèche du temps, mais la rencontre à revers. Cela vient de l’avenir. C’est à venir. Cela vient, finalement de la mort, ce seuil du bout de la vie.
Ce qui est toujours pareil et prévisible, ce qui est déterminé par notre nature et ce qui la détermine, entre dans la vie par la porte de la naissance. C’est le contexte de notre vie.
Ce qui est unique, tellement unique que cela n’a jamais existé avant, ne peut entrer dans la vie qu’à partir de l’autre côté, à travers la porte de la mort, et cela s’approche de nous et nous rencontre à chaque instant dans les choix que nous faisons. Chaque moment de choix est une remise en question d’un déterminisme. Chaque moment de choix est la manifestation de ce que nous avons de plus intimement unique. Et même, plus largement que cela, chaque imprévu, chaque découverte, chaque acquisition nouvelle est un cadeau qui s’en vient depuis l’avenir. C’est notre être dans ce qu’il a d’essentiellement original qui se révèle ainsi à chaque instant.
Alors la mort, de ce point de vue qui n’oublie pas que les Hommes sont plus grands que tout ce que l’on peut en voir, n’est pas plus proche du vieillard que du nouveau-né.
Bien à vous
Guillaume Lemonde
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