LES PLUS GRANDES DIFFICULTÉS SONT LÀ OÙ ON NE LES ATTEND PAS
Les plus grandes difficultés sont là où on ne les attend pas. Cela semble évident: quand on peut s’attendre à une difficulté, on peut également s’y préparer.
De ce fait, on se dit qu’il serait bon de lister toutes les difficultés possibles afin de n’en laisser aucune dans l’ombre. Si l’on pouvait être prêt à tout, on atteindrait même une situation d’où le risque serait supprimé.
Mais ce qui est vertigineux, c’est de penser que lorsque l’on aura tout prévu, les plus grandes difficultés seront encore là où on ne les attend pas…
Ce que l’on peut prévoir, c’est le passé :
Prévoir, c’est pouvoir projeter vers plus tard les conséquences de causes que l’on a reconnues.
Or les causes sont antérieures à leurs conséquences. C’est pour cela que je dis que ce que l’on peut prévoir, c’est le passé: c’est le prolongement d’un enchaînement de causes et de conséquences vers plus tard.
Ainsi, on ne peut prévoir que ce qui a déjà été. Et comme, à chaque instant, ce qui a déjà été est un ensemble fini d’évènements, on ne peut prévoir qu’un nombre fini de choses.
Ce que l’on ne peut pas prévoir en revanche, n’a pour nous pas de lien avec le passé :
Cela vient depuis l’autre côté : depuis l’avenir (avenir: ce qui advient, ce qui vient à nous). Le hasard, l’accident, l’imprévu, viennent de l’avenir et c’est un nombre infini d’évènements possibles qui se présente là.
Mais bien-sûr, ces événements ne surgissent depuis l’avenir qu’aussi longtemps que l’on ne peut pas les prévoir. Comme en physique quantique, ces événements se présentent depuis le passé ou depuis l’avenir, selon l’observateur.
S’ils sont déjà arrivés, ils sont tombés dans le passé et on peut alors le plus souvent les expliquer, les comprendre et se préparer à un nouvel épisode de même nature.
S’ils sont inédits et sont en train de se produire alors qu’ils n’étaient pas prévus, ils nous sollicitent dans ce qui en nous ne peut se référer à rien. Ils nous appellent à nous saisir du talent de n’attendre rien en particulier, d’être disponible pour ce que l’on n’attendait pas : cela s’appelle la confiance.
Autant l’espoir est l’attente d’une chose en particulier (on prévoit et on espère que ça ira comme on a prévu), autant la confiance est une non-attente.
Si l’on n’essayait même pas de prévoir ce qui peut arriver, on se couperait du passé et donc de ce qui nous permet d’avoir une conscience de nous-même (l’amnésique ne sait plus qui il est). Ne rien vouloir prévoir, c’est s’effacer, s’annuler, s’endormir. Quelqu’un d’éveillé prévoit.
À l’inverse, si on croyait devoir tout prévoir, on se fermerait à l’infini. On se fermerait à des changements qui soient de réels changements et non de simples recombinaisons de ce qui existe déjà. Essayer de tout prévoir, c’est passer à côté de cadeaux inespérés. Dans une société du risque zéro, il n’y a rien à attendre de la vie : tout est déjà là, tombé dans le passé, connu, fini…
Ainsi, lorsqu’il arrive un imprévu, n’oublions pas que, si cela remet en question ce que l’on connait, cela apporte également, et quoi que l’on en dise sur le moment, la possibilité d’un changement.
Je vous laisse avec ça.
Bien à vous,
Guillaume Lemonde
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Je lis ce matin chez C. Bobin: ” Beaucoup de belles choses nous attendent, sans jamais s’impatienter de nous voir venir”. Voilà de quoi aimer l’avenir.