DUSSES-TU VIVRE TROIS MILLE ANS
par Olivia Melchior
Les mots qui vont suivre ont traversé les époques et nous sont offerts encore aujourd’hui, à nous qui avons l’impression d’être si instruits et si évolués alors même que nous craignons et que nous combattons les choses les plus naturelles de notre existence: la vieillesse, la mort, les réminiscences du passé, les événements futurs…
« Dusses-tu vivre trois mille ans et autant de fois dix mille ans, souviens-toi pourtant que personne ne perd une autre vie que celle qu’il vit, et qu’il n’en vit pas d’autre que celle qu’il perd.
Donc le plus long et le plus court reviennent au même. Car le présent est égal pour tous ; est donc égal aussi ce qui périt ; et la perte apparaît ainsi comme instantanée ; car on ne peut perdre ni le passé ni l’avenir ; comment en effet pourrait-on vous enlever ce que vous ne possédez pas ?
Il faut donc se souvenir de deux choses :
- l’une que toutes les choses sont éternellement semblables et recommençantes, et qu’il n’importe pas qu’on voie les mêmes choses pendant cent ou deux cents ans ou pendant un temps infini ;
- l’autre qu’on perd autant, que l’on soit très âgé ou que l’on meure de suite : le présent est en effet la seule chose dont on peut être privé, puisque c’est la seule qu’on possède, et que l’on ne perd pas ce que l’on n’a pas.»
MARC AURÈLE (121-180)