PENSER L’HUMAIN À PARTIR DE L’AVENIR – UNE TÉLÉO-PSYCHOLOGIE
- Posté par Guillaume Lemonde
- Catégories Articles, Démarche Saluto, Relation thérapeutique
- Date 9 juin 2023
Bonjour ! Au cours des prochains mois, je vous fais participer de temps à autre à l’écriture d’un ouvrage. Vous allez trouver ici le début du premier chapitre. L’introduction, publiée il y a peu est à trouver sous ce lien.
Ce texte va peut-être éveiller en vous des questions, des remarques, des incompréhensions. Je souhaiterais que vous les écriviez en commentaire (je ne prendrai pas en compte les messages me venant par d’autres voies.). Cela me permettra, un peu comme lors d’un échange épistolaire, d’aller plus loin et de préciser toujours plus avant ce que je tiens à partager avec vous. D’avance, je vous remercie pour vos contributions précieuses et pour l’assiduité avec laquelle, chaque semaine, vous êtes au rendez-vous. En vous souhaitant bonne lecture, je vous adresse mes plus fraternelles salutations.
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Pour une psychologie ouverte à ce qui vient de l’avenir – UNE TÉLÉO-PSYCHOLOGIE
Lire l’introduction en suivant ce lien
CHAPITRE 1.
– Penser l’humain à partir du passé et le penser à partir de l’avenir
Peut-on penser à partir de l’avenir ? Peut-on penser que quelque chose, encore à définir, puisse depuis l’avenir être à l’origine de ce que nous vivons actuellement ? Si tel était le cas, comment pourrions-nous identifier un facteur qui a priori ne serait pas encore présent et qui pourtant se manifesterait à travers l’événement que nous vivons ? Même si la physique quantique décrit des expériences lors desquelles la flèche du temps semble s’inverser, ces questions contreviennent à l’investigation hypothético-déductive des sciences expérimentales. Pour celles-ci, une cause précède forcément ses conséquences, ce qui permet de mettre en évidence les conditions initiales nécessaires et suffisantes pour qu’un phénomène apparaisse.
Depuis sa formulation par Claude Bernard au XIXe siècle, la méthodologie des sciences expérimentales pense l’humain à partir du passé : elle cherche dans le passé ce qui provoque l’apparition d’un événement. Comme nous voulons, pour notre part, mettre en évidence ce qui depuis l’avenir agit dans ce que nous vivons aujourd’hui, le point de vue de Claude Bernard se propose comme à l’opposé du nôtre. Il est donc précieux d’en prendre conscience, car cela nous donne une base pour notre recherche. En se faisant face, ces deux points de vue se complètent pour une compréhension totale des événements rencontrés.
Prenons l’exemple d’un romancier rédigeant une histoire. D’un côté, il prend grand soin du point de départ de son roman, car de lui dépend la fluidité du reste. Il plante le décor au mieux de ce qui est nécessaire pour la suite. Lorsque nous faisons une étude littéraire, nous sommes invités à examiner le décor, le contexte dans lequel l’œuvre a été écrite. Ces prémices semblent constituer le terreau dans lequel l’œuvre a germé. On y trouve à cet endroit les intentions d’auteur. Le contexte et les intentions sont du côté du début. On les examine en regardant vers le passé. D’un autre côté, tandis qu’il est en train d’écrire, l’auteur est en lien avec un dénouement. Il écrit à partir de ce dénouement. Le dénouement n’est pas forcément ce qu’il pensait au début de la rédaction. Il est à distinguer de l’intention originelle. Mais, même s’il ne lui est pas connu dans ses formes extérieures, c’est le dénouement qui oriente le récit. Il lui donne une direction, un sens. Les romanciers comprendront. Les deux points de vue, celui du passé qui permet d’imaginer la prochaine étape et celui qui depuis l’avenir donne une orientation générale à ce qui s’écrit maintenant, sont complémentaires.
Il n’existe aucune raison valable de poser a priori que le dénouement d’un événement, voire celui de notre vie entière, même s’ils nous sont encore inconnus et non passés dans des actes, ne sont pas en train d’agir dans le déroulé de ce que nous vivons ; ou alors rien n’a de sens au-delà des conditions initiales (ce que pense un Claude Bernard). Il est vrai que la question du sens va se poser très vite dans notre recherche. Là où les neurosciences, suivant la méthode de Claude Bernard, l’identifient dans des prémices biologiques déterminant notre conscience, peut-il être pensé à partir de l’avenir ?
Mais alors, une autre question se pose : si un dénouement à ce que nous vivons est porté par quelque chose agissant d’ores et déjà depuis l’avenir et qu’en même temps nous n’en avons pas conscience, qui est en train d’écrire l’histoire que nous vivons ? Qui est l’auteur de notre existence ? Avons-nous un libre-arbitre ? Déjà remis en question du point de vue de Claude Bernard qui pense le monde comme déterminé par ses conditions initiales, un déterminisme venant de l’avenir ne finit-il pas d’achever le peu d’espoir que nous pourrions nous faire quant à son existence ? Qu’en est-il ?
Le point de vue des sciences expérimentales sur la nature humaine et celui qui se place dans l’avenir étant dans une polarité temporelle, nous devrions percevoir dans l’une, en ce qui concerne notre rapport au temps, tout ce qui ne se trouve pas dans l’autre. Si nous portons notre attention sur la nature humaine telle que la percevait un Claude Bernard, le point de vue de l’avenir doit pouvoir s’éclairer en creux.
À SUIVRE
Guillaume Lemonde
Médecin, chercheur, développe et enseigne la démarche Saluto dans ses différents champs d'application. Après des études de médecine à Lyon, il découvre la pédagogie curative et la sociothérapie, alliant la pédagogie et la santé. Pour lui, la question de toujours est d’offrir l’espace et les moyens permettant à chacun de devenir acteur de sa vie. Il ouvre un cabinet en Allemagne où il poursuit ses recherches dans le cadre de l’éducation spécialisée, puis en Suisse.
À partir de l’étude des grands chapitres de la pathologie humaine, il met en évidence quatre étapes de la présence à soi et au monde (1995) et découvre et développe à partir de cette recherche la Salutogénéalogie (2007) et la démarche Saluto (2014).
Il donne des conférences et des séminaires de formation pour enseigner cette démarche.
Il est auteur de publications faisant état de ses travaux.
1 commentaire
J’écris des romans et je vois en effet très bien de quoi vous parlez 🙂
En revanche, je ne comprends pas très bien le dernier paragraphe. Serait-il possible de le formuler autrement ou encore de le préciser ?
Merci !