“L’HOMME EST PLEINEMENT HOMME LORSQU’IL JOUE”
L’Homme n’est pleinement Homme que lorsqu’il joue
À l’automne, alors que nous rendions visite à une bonne amie vivant à Sofia, nous passâmes dans le square qui jouxte le stade national Vassil Levski. Je découvrais, ornant l’entrée de l’édifice d’une architecture toute soviétique, une phrase écrite en caractères cyrilliques. Cette phrase, je l’avais rencontrée autrefois en Allemagne. C’était une vieille connaissance :
L’Homme n’est pleinement Homme que lorsqu’il joue.
Cette phrase est de Schiller, un dramaturge et philosophe allemand du XVIIIème siècle. À ma connaissance, il n’y avait à son époque pas encore de stades, et le jeu auquel il fait allusion ne connaît ni championnats, ni règles, ni arbitres. C’est un jeu libre. Comme au théâtre lorsque l’on improvise.
Ce jeu nécessite simplement que l’on se lance, que l’on décide de se lancer. Il nécessite que l’on cesse d’écouter le souffleur qui se cache dans les plis du rideau de la scène. Et c’est là le plus difficile, mais c’est également là que réside notre liberté la plus essentielle. Le souffleur, celui qui connaît le texte écrit par avance et qui ne veut rien savoir de notre improvisation, c’est notre peur. Nous avons à décider de lâcher la peur que l’on voudrait calmer en écoutant le souffleur. Nous avons également à lâcher la haine que l’on éprouve à l’encontre des accessoires qui nous entourent et qui nous pousse à vouloir les changer.
Expérimenter la peur, expérimenter la haine, les vivre, être témoin du joug sous lequel elles nous placent et ôter ce joug.
C’est au moment où l’on décide de ne rien vouloir changer à la scène sur laquelle nous nous trouvons, que nous devenons libres de jouer notre jeu. C’est au moment où nous décidons de ne plus refuser les figurants et les accessoires qui nous sont donnés, que nous commençons à pouvoir improviser. C’est au moment où nous nous lions intimement à ce qui est et avec ceux qui sont dans notre histoire, que nous devenons libres d’agir d’après nous-mêmes et non d’après ce que la peur ou la haine décident pour nous. Ce lien qui rend libre, ce lien qui élève à quelque chose de nouveau, est l’expression la plus aboutie de l’amour.
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Guillaume Lemonde